Son temps libre, Ryutaro aimait le passer à l’extérieur de Kyôgaku. S’enfermer était une chose à laquelle il ne s’était jamais résolu. Manque de pot, aujourd’hui la météo n’était pas au rendez-vous, mais cela ouvrait la possibilité au nippon de se laisser aller à une chose qu’il n’avait pas fait depuis un bout de temps : les magasins. Naturellement soigné, l’apparence physique était quelque chose de relativement haut placé dans l’estime de Ryutaro qui avait toujours aimé prendre soin de lui. Amoureux des belles choses, il tâchait d’être raisonnable quels que soit ses achats de manière à se faire de petits plaisirs de temps à autre. Aujourd’hui, il passerait la journée dans le quartier de Shibuya en quête de quelques emplettes.

Arrivé sur place, il se contenta de faire du simple lèche vitrine histoire de repérer les quelques boutiques qui pourraient lui offrir satisfaction et s’arrêta finalement devant un restaurant qui attira son attention. Ce dernier offrait un système de restauration rapide à ses clients, c’était parfait pour Ryutaro qui pourrait continuer ses repérages tout en se remplissant l’estomac. Devoir se presser pour manger était une chose que le nippon n’appréciait pas particulièrement, d’ailleurs, devoir se presser quelle qu’en soit la raison était une chose qui avait le don de le mettre dans tous ses états. Planté devant une même vitrine depuis cinq bonnes minutes, il semblait subjugué et pouvait en décoller ses yeux. Cette veste toute de cuir faite était splendide, son prix un peu mois, mais rien ne l’empêchait de l’essayer pour le simple plaisir de la sentir sur lui. Une fois son repas avalé, il se pressa jusqu’à l’intérieur de la boutique, s’accaparant l’une des nombreuses vendeuses qui y travaillaient. Devoir fouiller indéfiniment à travers les rayons était une perte de temps, Ryutaro lui préférait aller à l’essentiel : la veste qu’il lui fallait, c’était celle de la vitrine, pas une autre.

Une heure, c’est le temps qu’il fallu à Ryutaro pour se décider à prendre la veste ou non. Durant tout ce temps, il l’avait essayée à plusieurs reprises, s’observant longuement devant la multitude de glaces qui s’offraient à lui. Il avait finalement craqué et lancé un « je la prends » sur un coup de tête, se dirigeant vers la caisse. S’il avait été réticent une première fois, puis une autre, c’était vis-à-vis de son prix relativement élevé, mais il tâcherait de se serrer la ceinture sur autre chose. Après avoir encaissé le nippon, la vendeuse prit soin de lui faire une carte de fidélité sur laquelle elle avait déposé un tampon, la lui tendant avec un grand sourire commercial auquel l'athlète ne prit même pas la peine de faire attention.

A peine était-il sorti de la boutique que Ryutaro avait déjà des vues sur celles qui lui faisait face. Encore une fois, il resta un certain temps à détailler les mannequins que l’on pouvait voir en vitrine. Il allait entrer mais une voix l’interpella, chose qui était plutôt rare pour quelqu’un qui comme lui entretenait très peu de rapports avec le monde qui l’entourait. A cet instant, il aurait bien simulé une forte surdité, mais le ton qu’on avait utilisé pour l’interpeller sembla l’intriguer au point qu’il fini par se retourner. Kimura Yuki, ou le pire être que la Terre n’est jamais porté, du moins selon Ryutaro. Ce n’était pourtant pas quelqu’un de bien méchant, il pouvait même être plutôt gentil, mais Ryutaro ne le supportait décidément pas. Depuis qu’ils s’étaient croisés au détour d’un couloir à Kyôgaku, Yuki n’avait cessé de toujours chercher à entamer la discussion avec le nippon qui n’avait qu’une seule chose en tête : s’en débarrasser au plus vite. Et voilà qu’aujourd’hui ils se retrouvaient, par hasard, faisant les boutiques dans le même quartier. Conscient que Dieu devait vraiment lui en vouloir pour lui infliger une telle chose, Ryutaro poussa un soupir qu’il ne chercha pas à masquer. « Content de te revoir … Je ne pensais pas te trouver ici, dis donc. Mais puisque tu y es … Je pourrais peut-être te tenir compagnie … hein ? » ; « Encore toi … Tu ne crois pas que devoir se croiser à l'école est suffisant pour devoir en plus faire les magasins ensemble ? » Lança-t-il à Yuki avait son air toujours aussi froid et distant.

La gentillesse n'avait jamais été le fort de Ryutaro, et bien qu'il lui arrive de faire des efforts pour ne pas passer pour le méchant de service, le condamner à n'avoir pour compagnie que celle de Yuki était bien trop lui demander. Mais voyant le visage de ce dernier se décomposer, Ryutaro laissa un soupire s'échapper à nouveau avant de reprendre : « Je te préviens, je n'ai pas l'intention de passer tout l'après-midi avec toi. Si je m'arrête devant une boutique, tu t'arrêtes. Si je te demande de te taire, tu te tais. Et si on croise quelqu'un de l'école, tu as intérêt à déguerpir vite fait. Manquerait plus qu'on nous croit amis. »

Amis, ce mot semblait bien étrange pour Ryutaro qui n'avait pas l'habitude de le prononcer, il lui était presque même inconnu, mais trêve de blablaterie. La fin de la journée promettait d'être longue, et que Yuki ne compte pas sur lui pour lui faire la discussion, sa présence lui était déjà bien assez pénible pour en plus devoir lui raconter les derniers potins.