Je tournais en rond. Entre quatre murs. Un vieux disque des Beatles tournait en boucle dans la petite chaîne stéréo du paternel. Je l’avais mis à tout hasard, le premier qui me tomberait sous la main, avais-je pensé… Je ne pouvais supporter le silence, sachant que ma voix n’irait jamais le briser. Personne. Pas un chat, pas un parent –en voyage depuis quelque mois-, rien. Et moi. Moi, je restais là, assis sur le canapé, contemplant la télévision éteinte. Ma silhouette se reflétait distinctement sur l’écran noir. Tout était propre, luisant sous la couche de détergeant que j’avais utilisé antérieurement. En effet, je passais mes journées à tout ranger, défaire, re-nettoyer, à nouveau déranger. Sans cesse. Je me faisais chier. Néanmoins, je ne désirais pas mettre le pied dehors ; aussitôt les cours finis, je courais chez moi et je m’ennuyais encore. A un tel degré que c’était presque devenu une occupation… Aussi, je n’avais pas dormi dans ma chambre depuis quelque jours, je la laissais tel quelle, sans jamais toucher au moindre détail. Il m’arrivait de l’observer du coin de la porte ; pièce comme figé dans le temps ; mon état d’âme du moment. C’était triste, terne, à en chialer…

Aujourd’hui, je n’avais pas changé ses mauvaises habitudes. En réalité, je n’avais pas le courage de remonter la pente, de me montrer un temps soi peu normal –si jamais je l’avais été un jour-. Sans vraiment savoir pourquoi j’allais mal, je me laissais doucement sombrer dans l’oublie. La perfection qui animé l’appartement commençait sincèrement à m’écœurer… Semblable à une odeur nauséabonde perçant mes narines, les enflamment au passage. Dans un élan d’origine inconnue, je me levais, renversa une pile de CD, frappa dans une chaise, secoua le pardessus du divan, retourna la table basse. Satisfait de ma connerie, j’étais bon à tout remettre en place. Mais plus tard, ou demain, ou pas… Je m’écroulais pour la seconde fois sur le canapé, m’enfonçant toujours un peu plus entre les coussins. Clope au coin des lèvres, télécommande à la main, je m’ennuyais. Le temps passé sans aucune répercussion sur ma modeste personne… Je ne fumais pas que du tabac, et ce, ma tête l’avait bien compris. Elle tournait, m’arrachait des grimaces de douleur, mais je souhaitais plus : être totalement dépassé, submergé. Oh oui je le voulais. Seulement, le sommeil me rattrapa plus vite que je ne l’aurais pensé, j’eu à peine le temps de retirer mon pull et mon jeans, les faire glissé sur le tatami, et me recouvrir de la grosse couverture que mes paupières tombèrent, si lourdes.

Un bruit sourd, une voix féminines, je rêvais ? Dans le doute, j’ouvrais péniblement les yeux, un léger courant d’air humide vint me chatouiller le visage ; la fenêtre de la cuisine était ouverte, peut-être qu’il s’était mis à pleuvoir.

Eun Shi « Ash’, ouvre ! Putain grouille ton cuq ! Ashiya putaiiin !! »

‘Shi ! Je voulu me précipitait, mais j’avançais au ralentit, ma main attrapa la poignée de la porte, et j’ouvris sans tarder. Encore un peu de fumer dans les poumons, ma tête semblait toutefois me vouloir du bien, ne me faisant pas souffrir. Non. Le seul maux dont je souffre étant le contact avec les tissues glacés de ma meilleure amie. Elle m’étreint aussi fort qu’elle le pu très certainement, néanmoins le choque fut plus violent entre nos températures corporelles. Gelée. Elle était complètement congelée, me faisant frissonner de tous mes membres. Paradoxalement tout de même, je me sentis bien. Submergé par autre chose que des substances douteuses, un sentiment bon et chaud… J’avais besoin de sa présence, je ne pouvais le nier. J’aurais du d’avantage la sollicité, mais si je ne l’ai pas contre moi, je ne peu me rendre compte à quelle point seule sa présence me soulage. Elle était là, je n’étais plus isolé. Peu à peu, je découvrais l’odeur immonde d’alcool dont ses vêtements, jusqu’à ses cheveux s’étaient imprégnés… Quelle horreur ! Je ne l’invitais pas à entrer, elle semblait n’avoir que très peu de force. Du mieux que je pu, je saisis le haut de ses hanches, la soulevait et l’amena jusqu’au sofa. Je ne suis pas très fort, et je tombe légèrement sur elle dans cette dernière action. Elle pleure, ses larmes perlent lentement sur ses joues, fluides, transparentes. Cette vue me déchire silencieusement la poitrine, un regard peiné marque violemment mon visage, j’ai presque pitié. Dans cet état, elle a tout de lamentable, ses cheveux ébouriffés empiètent sur ses joues lui donnant un air sauvage, la bouche entre ouverte, on devine aisément que l’intérieure doit se trouver pâteux. Je me retire, l’observant un moment avant d’agir. Je remarque que je n’ai encore émis aucun son. Mais que dire ? Elle s’est encore foutue dans un état pas possible au cours d’une soirée plus que bien arrosée, en compagnie de ses potes. Voilà l’affaire.

J’entreprends de la déshabiller, non pas d’une façon perverse mais simplement pour qu’elle soit à l’aise. Je m’occupe d’elle, comme elle l’aurait fait dans la situation inverse. Tout en retirant chacun de ses vêtements avec lenteur, je réalise que nous devions être bien pitoyable lors de nos soirées passés ensemble, se trainant l’un l’autre, bras dessous bras dessus, cuvant au coin d’un trottoir. Oui pitoyable, et pourtant qu’est ce qu’on riait ! Une fois toutes ses fringues posés sur la table basse –que j’avais remis en place à la vas vite-, je plongeais une nouvelle fois mon regard dans le sien. Je n’avais toujours rien dit… J’hésitais. Mais avant d’ouvrir la bouche, je me mis à califourchon sur elle, l’enlaçant de mes bras frêles, collant toujours un peu plus son corps dévêtu contre le mien. Je ramenais la couverture sur nous, et d’une façon étrange, je me glaçais la peau jusqu’au os, en échange de lui procurer un peu de chaleur ; échange équivalent. Je glisse mes mains dans sa nuque ; elle est humide et glissante, la transpiration. Je les remonte jusqu’à son visage, attrapant son visage entre mes doigts, balayant aussi des larmes à l’aide de mes pousses. Doucement mes lèvres se pressent sur son front, et je me décide enfin :

Ashiya « Eun Shi… Dans quel état tu t’es foutu… Et pourquoi tu pleures ? T’as mal ? »